Le 27 mars, nous fêterons le Printemps des Poètes à Valenton !
Les Armes miraculeuses, dont s’inspire ce duo avec Thomas Savy à la clarinette basse, est un recueil de poèmes écrits par Aimé Césaire pendant la seconde guerre mondiale. Césaire passera la majorité de cette période à la Martinique où il enseignera les lettres.Avec Susanne, son épouse, et des intellectuels martiniquais, il y fondera la revue littéraire Tropiques dans laquelle paraitront d’abord ces poèmes qui fustigent le fascisme et le colonialisme. Le message véhiculé étant sans concession avec le régime en cours, la gageure pour Césaire est de contourner la censure. Cette dernière est d’autant plus intolérante que la Martinique est alors sous le contrôle de Vichy représenté par l’amiral Robert. Pour parvenir à publier, Césaire utilisa le mode d’expression surréaliste comme d’un code. Touchant à l’orfèvrerie, le déploiement lexical y est tout aussi précis que recherché. Les sonorités et les rythmiques qui jalonnent la versification y sont définies comme une matière scénographique, autant propice à la projection mentale qu’à l’exploration sensorielle. André Breton, rencontré en 1941, ne s’y trompera pas. Il écrira la préface du Cahier d’un retour au pays natal , dans laquelle il désignera Césaire comme grand poète, notamment en ces termes :
« la poésie de Césaire, comme toute grande poésie et tout grand art, vaut au plus haut point par le pouvoir de transmutation qu’elle met en oeuvre et qui consiste, à partir des matériaux les plus déconsidérés (…) à produire la liberté »
La transmutation est en effet un thème récurrent dans Les Armes miraculeuses et se trouve particulièrement figurer dans Les pur-Sang. Dans ce poème se développe une dramaturgie sous la forme d’un récit introspectif qui s’étend en volutes ou s’égraine en saccades. À travers un alliage de mots et de musique, Thomas Savy et moi-même suivrons le fil de cette exploration. Alors qu’une descente dans la psyché du poète semble s’y opérer, c’est en réalité l’avènement progressif d’une conscience de l’humain qui, depuis son essence indivisible, est menée vers une nouvelle ère. Comme Césaire le dit clairement dans son Discours sur la Négritude, il s’agit de ne plus « couper l’homme de lui-même, couper l’homme de ses racines, couper l’homme de l’univers, couper l’homme de l’humain ». Une renaissance symbolisée par une effusion végétale qui prolonge l’humain. Le poète y célèbre un terreau commun, fruit d’un combat intraitable pour la fraternité.
« Mes pieds vont le vermineux cheminement
plante
mes membres ligneux conduisent d’étranges sèves
plante plante
et je dis
et ma parole est paix
et je dis et ma parole est terre
et je dis
et la Joie
éclate dans le soleil nouveau »
Aimé Césaire - Les Pur-sang - extrait
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